Table ronde textile des Rencontres de l’Économie Régénérative 2025
- Juliette Malaquin
- il y a 2 jours
- 4 min de lecture
(7–8 novembre 2025, Lyon – Cité de la Gastronomie)
Les 7 et 8 novembre 2025, nous avons vécu un moment charnière pour notre mouvement. Pour la première fois, tout un écosystème d’acteurs engagés dans l’économie de la régénération — ou économie symbiotique — s’est rassemblé à Lyon, à la Cité de la Gastronomie. Un lieu symbolique pour évoquer ce qui nourrit nos sociétés, au sens propre comme au figuré. Pendant deux jours, plus de mille personnes par jour ont arpenté les trois étages du bâtiment, révélant une effervescence rare et une réelle soif de transformation.
Ces Rencontres, propulsées par Mush, i-DEE et les collectivités du bassin lyonnais, ont confirmé quelque chose que nous pressentions déjà : la régénération n’est plus un concept émergent, c’est un mouvement installé, mûr, prêt à se structurer — et nous avons, collectivement, un rôle clé à jouer dans cette structuration.
Un espace pluriel, vivant et exigeant
Ateliers, tables rondes, démonstrations, animations, stands associatifs… La programmation ressemblait davantage à une cartographie vivante qu’à un simple événement. On pouvait passer d’un atelier pratique de mise en mouvement à une conférence de haut niveau théorique, puis descendre pour découvrir des projets étudiants qui expérimentent des solutions concrètes.La première journée, dédiée aux professionnels, s’est ouverte avec une table ronde des “Avengers” animée par Vinz Kanté où intervenait Isabelle Delannoy, rappelant d’emblée que la transformation de nos modèles est un processus de co-construction. La régénération n'existe que dans la coopération — une phrase que nous avons entendu résonner dans beaucoup de conversations par la suite.
L’après-midi a donné lieu à deux ateliers particulièrement marquants.
PEPS, proposé par les étudiants de l’Entreprise Symbiotique
Le jeu faisait travailler ensemble les concepts, les définitions et surtout les exemples réels issus des trois sphères de l’économie symbiotique : technosphère, sociosphère, biosphère. Voir à quel point des initiatives existent déjà, ici et ailleurs, fut très pertinent pour reconnaître la dimension terre à terre du sujet de la régénération.
Le deuxième atelier portait sur le rapport AFNOR Spec sur la régénération, résultat d’un travail collectif auquel ont contribué entre autres Catherine Dauriac et Isabelle Delannoy. Présenter ce rapport dans un contexte aussi ouvert a permis d’en saisir la portée : c’est un outil structurant, un socle pour les années à venir, dans l’attente d’un nouveau palier : celui de la norme.
Une deuxième journée plus calme, mais tout aussi fertile
La journée grand public a rassemblé un public plus clairsemé mais profondément curieux. L’ambiance était douce, propice aux échanges nourris, presque intimistes. C’est dans ce contexte que s’est tenue la table ronde autour du textile.
La table ronde textile : remettre du sens, remettre du lien
Réunir autour d’une même table : Lucas Condé Salazar Thivolet (Fashion Green Hub), Marie-Eve Nardou (Groupe Human Ocean), Isabelle Arnardi (Les Tissages de Charlieu + artiste textile) et Catherine Dauriac, présidente de Fashion Revolution France, c’était réunir quatre angles de vue profondément complémentaires.
Cette diversité n’était pas seulement volontaire : elle illustre la façon dont le textile peut redevenir un levier de régénération, mais seulement si nous acceptons de sortir des silos. Chacun des intervenants est arrivé avec son expérience, ses doutes, ses pratiques, et ensemble, ils ont dessiné un panorama clair du contexte actuel.
Poser le décor
Un secteur encore largement extractif, dépendant d’une chaîne d’approvisionnement mondialisée, vulnérable, et où les pratiques régénératives restent marginales, souvent portées par des pionniers isolés.
Parler de régénération, sur le terrain
Comment redonner du souffle, de la valeur, de la résilience ?En replaçant l’humain au centre, en recréant des modèles ancrés dans les territoires, en restaurant les écosystèmes, en réhabilitant les savoir-faire qui permettent d’imaginer une industrie textile souveraine et vivante.
Chaque intervenant a apporté une brique :
Lucas a rappelé l’urgence d’accompagner concrètement les entreprises vers des modèles circulaires territorialisés et nous a rappelé les difficultés des organisations ESS.
Marie-Eve a défendu la nécessité de reconnecter les enjeux du textile aux enjeux de la terre, notamment l’agriculture, souvent invisibles.
Isabelle a pointé les difficultés de l’industrie à se repenser en intégrant de nouvelles pratiques et a néanmoins conclu avec une belle innovation sur le chanvre.
Catherine a réaffirmé la nécessité de placer le vivant au centre des actions en rappelant notamment les abus du secteur quant au vivant humain, tout en rappelant la nécessité du travail d’éducation, qu’effectue notamment Fashion Revolution France.
De mon rôle de facilitatrice
Ce que je retiens, c’est la profondeur des échanges, la sincérité des regards partagés et l’envie commune de faire écosystème plutôt que de se juxtaposer ou se concurrencer.
Nous avons pu créer un espace où la parole circulait, où les idées se répondaient naturellement. C’est exactement ce dont notre secteur a besoin aujourd’hui : des espaces pour réfléchir ensemble, sans posture, sans injonction, avec lucidité et espoir.
Ce que cela dit du mouvement Fashion Revolution France
Ce moment a confirmé l’importance de notre présence dans ces écosystèmes, et la légitimité de notre voix. La régénération n’est pas un concept de niche pour nous : c’est un axe structurant de notre vision d’un futur textile juste et durable. De plus, le textile est souvent déconnecté de son importance en termes de revenus pour les grands groupes de luxe et de milieu de gamme en France, pays de la mode par excellence.
Cet évènement a marqué une étape supplémentaire dans notre engagement à transformer l’industrie textile de manière profonde, durable et collective.
Ces Rencontres de l’Économie Régénérative ont été une démonstration :
Nous avançons, ensemble.
Et le mouvement s’amplifie.
Juliette Malaquin


Commentaires